Nesidiocoris tenuis, également appelée Cyrtopeltis, est une punaise bien connue dans le sud de la France depuis une bonne dizaine d’années. Elle provoque des dégâts importants en tomate notamment et perturbe fortement les équilibres biologiques en place. Dans le Sud-Est, elle est présente dans 100% des exploitations hors sol en culture longue. Les entrées se font en été et jusqu’à la fin de l’automne. Les dégâts apparaissent dès décembre pour les plantations estivales et à partir d’avril pour les plantations de fin d’année. Sa zone géographique s’étend chaque année, elle est également présente dans le Sud-Ouest et de façon plus sporadique dans le Nord. Cette punaise est considérée comme un auxiliaire dans certains pays où elle agit comme Macrolophus sur aleurodes et Tuta absoluta notamment, mais, en France, elle attaque très fortement les plantes et nécessite des mesures de régulation. Une nouvelle méthode de protection biologique à base de nématodes auxiliaires est proposée par Koppert depuis la fin 2017. Une première présentation de la stratégie s’impose avec Audrey Vignaud, conseillère technique Koppert sur la région Sud-Est. L’expérience de la SCEA de Fontanel à Chateaurenard (13) est également partagée par une de ses codirigeantes, Bélinda Gailet.
Koppert : Rappelez-nous les dégâts causés par Nesidiocoris ?
Audrey Vignaud : Nesidiocoris pique les têtes des tomates, provoquant un anneau nécrotique circulaire, point de fragilité qui peut entraîner la cassure en tête lors de la manipulation. Les punaises peuvent également agir sur les pétioles et faire tomber/couler les fleurs. Les tiges, les pédoncules floraux et même le fruit lui-même peuvent aussi être attaqués. L’action est très rapide, et le seuil de tolérance d’autant plus faible, avec ce ravageur qui peut impacter directement le rendement. Cet ennemi progresse géographiquement.
Koppert : Quelles solutions prophylactiques proposez-vous contre Nesidiocoris ?
Audrey Vignaud : Une première action prophylactique s’impose : dès que les Macrolophus sont installés, nous préconisons de retirer les bourgeons axillaires (gourmands) et de les ensacher pour les éliminer de la serre. Les Nesidiocoris se focalisent en effet particulièrement sur les tissus jeunes, dont ces bourgeons. On estime éliminer ainsi 30% de la population, plus particulièrement des larves. Cette action est conseillée toute la saison pour une régulation mécanique vraiment bénéfique.
Les producteurs utilisent également des aspirateurs à insectes dès apparition des premiers individus détectés. Lors de journées bien ensoleillées et chaudes, ils aspirent les têtes une à une agissant sur les cinq premiers centimètres uniquement. Du soufflage est également utilisé efficacement en propulsant de la ventilation sur le haut des plantes et dirigée vers des panneaux glue sèche qui piègent de nombreux adultes.
Il existe une différence de positionnement très nette entre les Macrolophus que nous souhaitons préserver et les Nesidiocoris à éliminer. Les Macrolophus sont localisés plus bas sur la plante, à 20cm de la tête environ.
Koppert : Quelle est la nouvelle méthode de protection biologique employée dans le sud ?
Audrey Vignaud : Depuis janvier, nous préconisons le nématode auxiliaire CAPSANEM associé à l’adjuvant SQUAD pour lutter contre Nesidiocoris. Le changement de notre formulation nématode en gel et l’association avec SQUAD ont permis de positionner le nématode Steinernema carpocapsae contre cette punaise. Il y a eu des tests en cages d’élevage à Almeria, par la filiale Koppert Espagne, montrant l’intérêt de la méthode que nous avons validée sur le terrain.
Koppert : Quels sont les résultats obtenus avec CAPSANEM ?
Audrey Vignaud : Les résultats sont très nets. L’efficacité est très forte sur les larves. Les nématodes agissent également sur Macrolophus qui est très proche biologiquement de Nesidiocoris. Nous travaillons maintenant la qualité de la pulvérisation : il faut viser le haut de la plante et éviter le ruissellement. Il nous reste à affiner notre conseil pour essayer de moins affecter les Macrolophus. C’est un équilibre subtil mais CAPSANEM permet d’éviter de traiter chimiquement ce qui est l’objectif de nombreuses entreprises.
Koppert : Pouvez-vous nous parler de l’expérience CAPSANEM de la SCEA Fontanel ?
Bélinda Gailet: Nous produisons à Chateaurenard (13) cinq ha de tomates en sol et hors sol depuis quatre générations. Nous devons réguler la punaise Nesidiocoris car elle est puissante sur le secteur. CAPSANEM nous a convaincu par ses qualités de protection biologique. De plus, en tant que macroorganisme, il est sans délai de réentrée. Ce sont des atouts majeurs dans notre exploitation qui pratique la Protection Biologique Intégrée depuis qu’elle existe en France. L’efficacité a été observée bien que nous n’ayons pas fait de comptages précis. Nous avons utilisé CAPSANEM sur plusieurs blocs pour réguler la punaise et avons essayé déjà plusieurs méthodes d’applications : le petit pulvérisateur à dos en tête de plante de façon très localisée et aussi le robot de traitement en bouchant les buses du bas pour agir bien en tête et éviter nos Macrolophus. Nous allons peu à peu affiner et définir la meilleure option pour nous mais CAPSANEM est une voie prometteuse, un nouvel allié appréciable pour éviter les traitements.
Audrey Vignaud : En conclusion, cette nouvelle méthode de protection biologique du Nesidiocoris était très attendue par les producteurs dans le Sud. Nous étions dans une impasse technique avec cette punaise. CAPSANEM est un outil puissant et très prometteur pour la gestion du Nesidiocoris dès cette saison. Nous allons continuer à affiner la stratégie d'application pour un positionnement optimal et le plus précis sur la plante.